jamie dawson ≈ froy gutierrez

« James, montre moi ta joue. » Jamie leva les yeux vers sa mère, la mine sombre. « Qui t'a fais ça ? » S'il balançait il était mort. Ils allaient lui faire la misère. Encore et encore. Il secoua la tête et prit sa mère dans les bras. « James, je ne peux pas t'aider si tu en parles pas. Et ton père... Ton père va encore être très en colère. Tu vas lui dire que tu t'es défendu, hein ? » Il hocha de la tête. Mais en vérité le petit Jamie Dawson ne s'était pas défendu. Il avait vu le poing du caïd de la récré foncer droit sur son visage. Il avait entendu les moqueries des autres enfants derrière lui. Et il n'avait rien fait. Il était tombé par terre, il avait fermé les yeux et il avait pleuré toutes les larmes de son corps. À dix ans, Jamie Dawson était le garçon le plus timide et renfermé que l'on ai jamais vu.

« Qu'est-ce que c'est cette fois-ci ? » « J'en sais rien. Et j'ai pas envie d'en parler. » « James... » De l'autre côté de la table monsieur Dawson regardait la mère et son fils d'un air plein de dédain. Il n'en pouvait plus de voir son fils de faire marcher dessus en permanence. Il avait jeté l'éponge depuis longtemps. Il avait compris que Jamie était un raté dans toute sa splendeur. Mais ce soir là, quand sa mère entama un de ces discours tous rose tout mignon sur l'amour, il frappa du poing sur la table. « Mais tu vas te bouger oui ? Pourquoi ils aiment s'en prendre à toi ? Pourquoi tu ne fais pas comme tout le monde ? Pourquoi bordel est-ce que mon fils est incapable de répliquer ?! » Sa mère avait serré sa main dans l'espoir de le radoucir mais le mal était fait. Jamie était blême de l'autre côté de la table. Blanc comme un linge. En réalité il avait peur. Peur de commencer à se défendre, et que tout cela ne s'arrête jamais. Mais Jamie avait douze ans, et ce soir il décida que la prochaine fois qu'on se moquerait de lui, il répondrait.

« T'en veux encore ? » Son père avait raison. Voir un autre mec que lui à ses pieds en train de gémir, c'était beaucoup mieux. Le garçon agita les mains. Ah, cette fois-ci il avait gagné. Ce fut cette année là que ses résultats chutèrent. Quand il passa plus de temps à se venger de quinze ans de malheur qu'à bosser. Parce que Jamie en avait besoin. De passer ses nerfs sur quelqu'un. Au début il débuta par tout ceux qui avait pu lui jeter un regard de travers. Et puis s'était allé plus loin. Il avait laissé tombé les gestes pour la parole. Ce fut sa mère qui le sauva. Elle qui le résonna. Frapper, insulter... Ce n'était pas son fils. « Maman, s'il a commencé à me chauffer, c'est parce que j'ai dragué son meilleur ami. » Sa mère était resté muette. « J'aime les garçons maman. » Et sans un mot elle était montée dans sa chambre, une main couvrant sa bouche, retenant ses larmes sans doute. Ce ne fut qu'au milieu de la nuit qu'elle frappa doucement à sa porte de chambre. « Je suis désolée pour tout à l'heure Jamie. » Elle ne le nommait jamais ainsi. Juste quand elle se sentait coupable. « Je n'aurais pas du réagir comme ça. Je suis ta mère. Mais s'il te plaît, ne le dis pas à ton père. » Elle le prit dans ses bras, lui embrassa le front et ce soir là le cœur de Jamie vola en éclat.
Il l'avait fais. Il l'avait dit. Et maintenant son père ne pouvait plus s'arrêter. Il engueulait sa mère, il engueulait son fils comme jamais. On aurait du s'en douter disait-il. Il nous a jamais ramené de fille disait-il. Que des sottises. Et pourtant, son père essayait de se convaincre qu'il avait un soucis, un problème. Jamie voulu répliquer, dire quelque chose, lui expliquer. Et ce soir là il se mangea une claque monumentale. Sa mère hurla, et le lendemain, sans un mot, son père fit ses valises et déménagea pour de bon. À quinze ans Jamie venait de perdre son père.

« Des études d'économie, c'est quelque chose James ! » Sa mère était ravie. Ravie qu'il prenne un cursus qu'elle trouvait assez sérieux et prometteur. Ravie aussi qu'il ne lui quémande pas d'aller à l'armée. Elle avait toujours eu peur de perdre son fils. Et puis c'était trop cher pour eux, il le savait, alors il avait fait un croix sur ses rêves. Elle le lui répétait souvent : il avait grandis trop vite. Il était loin le petit garçon qui se faisait maltraiter par ses camarades de classe. Jamie s'assumait et il n'avait jamais été plus heureux qu'aujourd'hui. C'était un sportif dévoué, et un fêtard dans l'âme. Tout était bien. Sa vie, son rythme, ses habitudes, sa réputation. Jusqu'à l'arrivée de ce type. Au début c'était marrant de lui en faire voir de toute les couleurs. Il voulait le tester, juste pour voir. Et d'un certains côté, il aimait voir cette part de lui ressortir. L'inviter à cette soirée pour l'humilier un grand coup, c'était du génie. Comme ça, juste pour rire. Et pour se soulager aussi. Il en avait toujours besoin, trouver sa tête de turc. Et pourtant quelque chose changea. Il y avait quelque chose, dans son regard. Quelque chose qui le captiva aussitôt. Bah merde Jamie, il t'intrigue ce mec... Oui, c'était ça, il l'intriguait. Il ne pouvait lui parler. Certainement pas. Il était exclu, il avait pas d'amis et il avait une réputation à tenir. Hors de question qu'on le voit avec lui. T'as envie de lui Jamie. Tu le veux. Était-ce juste une lubie passagère ? Ou plus ? Maintenant, au grès des soirées, des cours, des entraînements il n'avait plus que son prénom en tête ; Johan.