feuerwalzer (w/jamie)

Alors que son père partait pour une énième conférence et qu'il rentrerait tard dans la soirée, Johan avait attrapé un sac et sortit de son placard un ballon de basket. Sa deuxième passion. Il le plaça dans son sac et alla jeter un coup d'oeil à sa mère. Elle était couchée dans son lit, un pot de glace et une bouteille posés sur son chevet. Les yeux rivés vers la télé, elle ne vit pas que son fils était à l'entrebâillement de la porte. Elle n'entendit même pas la porte d'entrée claquée et ne vit pas que la chambre de Johan était vide. Il faisait un truc interdit ce qui le rendait encore plus courageux. Il avait quitté l'imposante demeure froide et il était dans la rue. Comme un jeune de son âge. Johan en avait marre de tout ça et s'il avait eu de l'argent, il aurait quitté la maison pour vivre à l'université. Mais il savait que s'il osait prononcer le mot partir, son père le foutrait à la porte et il n'aurait plus rien. Et Johan avait peur de l'inconnu, dans une ville inconnue encore à ses yeux. A Berlin, il se serait débrouillé mais ici, non. Il avait reprit la route de l'université alors qu'on était samedi soir et il allait aller sur le terrain de basket, vide à cette heure-ci. Pendant une heure ou deux, il aurait l'impression de vivre son rêve. Il arriva rapidement au gymnase. Et il soupira. Il aurait aimé faire ça dans la légalité et non en cachette de tout le monde. Il sortit son maillot de basket aux couleurs des Lakers, qu'il avait acheté avec son argent de poche en secret à Berlin. Il sortit son ballon et il commença à faire rebondir la balle. Les gradins étaient vides mais il aurait aimé qu'il soit plein. Et il commença à commenter ses passes en allemand. Au moins personne ne le comprendrait.

Johan marqua deux ou trois paniers, et son visage habituellement fermé s'ouvrit et s'éclaira. A cette heure-ci, il n'avait pas de moqueries. A cette heure-ci, il était seul et avait l'impression de revenir à Berlin. Et s'il avait voulu, il aurait déchiré ses cours de physique-chimie. Mais non, de ce côté-là, Johan resta sage.S'il se faisait pincer, il faudrait qu'il explique à son père pourquoi il était à l'université un samedi soir. Il pourrait dire qu'il avait eu besoin d'aller à la bibliothèque pour chercher un livre. Un mensonge. Mais petit à petit, Johan devenait le champion dans les mensonges. Il continua de commenter son match imaginaire, tout en marquant des paniers des deux côtés. Et Johan était heureux. Johan était différent. Peut être que celui-là, les autres pourraient l'aimer. Si seulement. Mais avec la pression que son père lui mettait, et la honte qu'il lui mettait en l'accompagnant à l'université parfois, le faisait se renfermer sur lui même. Mais ce soir, c'était un Johan libre qui entamait la valse du feu.

L'économie était une matière fascinante. Pour ceux qui aimait les mécaniques du marché, les chiffres et les études comparatives. Pour quelqu'un qui rêvait d'avoir la tête dans les nuages comme le jeune Jamie, c'était différent. C'était une corvée histoire d'avoir un diplôme ne poche, un boulot qui lui permettrait de vivre convenablement. C'était pour sa mère qu'il le faisait. Elle l'élevait seule. Il vivait toujours chez elle (quelques jours par semaines seulement, il avait un don pour aller squatter chez les fraternité diverses et variés, trouver un autre lit que le sien pour une soirée n'était pas un souci pour lui) et tentait de l'aider comme toujours. Alors il bossait, le minimum pour y arriver. Il avait même du faire une croix sur deux entraînements de football pour réussir des examens. Mais aujourd'hui, c'était l'heure de se défouler. Il en avait besoin. Même s'il n'était pas un grand fan de basketball c'était pourtant vers ces terrains là qu'il se dirigeait. Ils étaient normalement désert à cette heure et il aurait dont la place pour lui tout seul et passer ses nerfs.

Sauf que ce soir les gradins étaient peut-être désert mais le terrain lui était bel et bien occupé. Il entendait depuis les couloirs des vestiaires les bruits d'un ballon rebondissant sur le sol. Il leva les yeux vers le ciel. Bon sang. C'était bien sa veine. Peut importe. En fonction de qui se trouvait là, il pouvait peut-être se défouler à deux. Ou alors il attendait. Sauf que Jamie n'était pas vraiment patient de nature. Il lissa son maillot (de football, mais peut lui importait, ils étaient confortables) et poussa la porte du terrain. L'élève qui se trouvait là était seul, et marquait panier sur panier. Ok il était doué. Discrètement il grimpa sur les gradins sans se faire remarqué et s'assit. Ce ne fut qu'au bout d'une minute qu'il comprit que c'était lui. L'allemand. Un sourire immense s'empara de son visage. Lui même ne serait dire si c'était de la pure méchanceté ou un un petit contentement de le voir ici.

Glückwünsche ! lâcha t-il en applaudissant.

Il venait peut-être de le sortir de ces pensées, et il n'en était pas peu fier. C'était le seul mot qu'il avait appris dans cette langue. Juste pour lui en plus. Il se souvenait l'avoir appris suite à un pari débile avec un autre troisième année, Johan en avait été la cible. Et quand ce dernier c'était retrouvé dans une situation embrassante lors d'une de ses soirées, il l'avait applaudit. Avec tout le monde. Et il avait encouragé tout le monde à le féliciter. Juste pour voir. Comme toujours. À présent quand il y repensant... Ses sentiments étaient mitigés. Il s'était levé de ses gradins, le regard malcieux et avait sauté la dernière rangée pour venir le rejoindre sur le terrain.

Alors comme ça on se débrouille pas mal au basket ?

dans le passé.
« Mec, t'es sérieux ? » Jamie hocha de la tête. Oh que oui, plus que sérieux. Ce soir c'était son soir. Il avait envie de déconner un coup, de voir les gens s'amuser. Et Johan aussi était là pour ça non ? Avec son accent étrange, il en faisait rire plus d'un. Johan, ah Johan. Il ne savait même pas pourquoi il lui prêtait autant d'attention. Il se souvenait que fut un temps, il avait été comme lui. Seul dans son coin. Mais ce temps là était révolu. « Johan mon pote ! » On aurait pu croire que Jamie était déjà éméché, mais pas du tout. « Un concours de shots ça te dis ? En fait t'as pas le droit de refuser, je t'ai inscris ! » Il disait tout ça avec le sourire. Alors, il allait dire quoi ? Allait-il regretté de s'être pointé à sa fête ? Aucune chance qu'il en gagne, pas face aux habitués qu'il avait en face de lui. « Celui qui perd à un gage ! »

Dans un moment de liberté, Johan revivait. Il était vivant, libre, il n'était plus le Johan qui ne pouvait rien faire et son visage était joyeux, souriant. Il avait l'impression de vivre dans un rêve. Et il ne voulait pas se réveiller. Il continuait d'enchaîner les paniers comme s'il avait fait ça toute sa vie. Et soudain, une voix le tira de ses pensées, le faisant sursauter. Une voix qu'il se serait bien passé d'écouter et une présence plus qu'indésirable. Il fronça les sourcils, il voulait presque se moquer à son tour de l'accent si horrible. Mais non, il ne fit rien. Il lança un dernier panier avant de fixer le garçon en face de lui, le regard plein de colère. Il ne l'avait pas aimé la dernière fois qu'ils s'étaient vus. Il le trouvait trop sûr de lui, trop arrogant à ses yeux, tout le contraire de Johan, qui avait l'impression de perdre ses moyens, à chaque fois qu'il était là. Johan le vit se rapprocher de lui et lui parler, comme si c'était naturel. Maintenant le jeune Allemand avait bien envie de partir, de l'ignorer mais s'il partait, cela voulait dire rentrer à la maison et supporter sa mère /ou/ ouvrir ses bouquins de chimie et faire semblant de travailler. Et à cet instant là, Johan se sentait mal. Après son père, c'était ce garçon là qui l'empêchait de faire ce qu'il voulait. Et alors qu'il supposait que son interlocuteur attendait une réponse, Johan le fixa d'un air noir et répondit:

"Ca ...pose.. un problème?"

Partagé entre l'envie de craquer et l'envie de l'insulter en allemand, Johan prit son sac et se rangea à l'avis de rentrer, il n'avait plus le choix.

Dans le passé

Johan avait eu l'exceptionnelle permission de sortir pour soi disant aller au cinéma avec des copains (copains qu'ils n'avaient pas mais ça son père ne le savait pas). Sauf qu'il allait à une soirée. Peut être pour le fait de se sentir étudiant et non écolier. Il ne savait pas pourquoi il y allait, parce qu'il ne connaissait et ne parlait à personne et il savait très bien que ça allait mal finir. Johan soupira avant de se rendre à la fête, vêtu d'une veste en cuir (encore acheté en secret) noire d'un tee shirt blanc et d'un jean noir. Comme ça son père ne se posait pas de questions. Il était bien habillé mais pas trop. Johan ne supportait pas toute la foule qu'il y avait et il était prêt même à repartir car faire office de plante verte, n'était pas son truc. Et soudain, il y avait ce garçon. Il le trouvait mignon mais il savait pertinemment qu'il n'avait pas le droit de penser ça. Il lui parlait et Johan tentait de comprendre. Mais il parlait trop vite et n'avait compris que la moitié de ses phrases. Il le fixa avec un air interrogateur avant de grommeler en allemand qu'il n'aurait du jamais venir. Pour lui, il sentait que devant la gentillesse de ce garçon, se cachait un piège. En tout cas, Johan avait compris le mot concours. Il lança alors:

"Concours?"